De la suspicion à la demande d'éclaircissements indispensables

Sont concernées, les Associations, en commençant par les sportives.

Résumé :

Quel est le problème ? :

Des joueurs censés être amateurs sont rémunérés par des clubs recevant beaucoup de subventions publiques. La loi interdit ce dévoiement de deniers publics. Pourtant le maire couvre ces irrégularités et refuse de communiquer les informations qui permettraient d'avoir une opinion éclairée après un jugement personnel.

Quelles sont les conséquences ? Les sommes en jeu sont colossales. Plutôt que de donner de l'argent public pour payer le salaire de joueurs professionnels, on pourrait mieux aider les clubs sportifs qui se consacrent totalement à la promotion de la pratique du sport amateur, notamment en direction des plus jeunes. 

Elargissement du problème :

Toutes les associations, et pas seulement les associations sportives, devraient être contrôlées, pour respecter la loi et pour conduire une politique municipale de subventions appuyée sur des fondements sérieux.

C'est aux conseillers municipaux de jouer enfin leur rôle, s'ils s'intéressent à Grasse.

 

Plan détaillé de l'article:

1 - La confirmation de la suspicion

2 - La prise en considération de la loi

3 - Le respect de la loi :

    3-1 l'activité subventionnable

    3-2 la définition de la subvention

    3-3 le contrôle par la collectivité

4 - La transparence

5 - Le problème grassois

6 - Conclusion

 

Ce « billet » fait suite à la demande d'un conseiller municipal de Grasse qui m'a avoué ne pas être au fait des problèmes de relations entre une municipalité et les associations qu'elle subventionne. Mon précédent billet (3.1.2019) lui a mis la puce à l'oreille. Sa démarche mérite d'être saluée. Je ne suis pas expert, mais peut-être les lignes qui suivent seront-elles suffisantes pour alerter nos élus grassois qui ne se sont jamais trop souciés de l'utilisation des quelque 2 millions d'Euros de subventions versés chaque année par la commune (mais il y a aussi les millions de l'agglo -la CAPG-, du département, de la région et de l'Etat).

 

1 - LA CONFIRMATION DE LA SUSPICION

Après un parcours du combattant et des mois de relances, quelques informations -quelques, seulement- me permettent d'affirmer que l'attribution et le contrôle des subventions à Grasse devraient faire l'objet d'un contrôle sérieux, ce qui n'est pas le cas depuis des années.

Faut-il sortir de Polytechnique pour comprendre que l'on est en droit de se poser des questions … et d'en poser aux conseillers municipaux qui votent les subventions ? Non ! Tout Homme doté de pouvoir de réflexion va pouvoir en juger par quelques exemples significatifs.

A partir de quelques rares documents, les surprises se multiplient et de grosses incohérences sont relevées en ce qui concerne les aides en €uros (sans compter les salles ou les stades).

Le Racing Club de Grasse (football), perçoit, bon an mal an, autour de 250.000 € de la ville, plus une dizaine de milliers d'€uros du département , ce qui représente un peu moins de 50 % de son budget. Il y a 540 joueurs de tous âges sur 664 licenciés ( dont 124 dirigeants, arbitres et animateurs).

Informations issues du dossier de demande de subvention pour 2017/2018 :

Nombre de salariés équivalent temps plein : 1,75

Compte prévisionnel : rémunération de personnel: 311.370 € + charges sociales ; 30.000 €

La question : 1,75 salarié coûte 341.370 € dans l'année, soit 16.250 € par mois !!! Vrai ? Humm !!!

Dans le rapport de son AGO (assemblée générale ordinaire) du 21.10.2016, le trésorier note que « la montée en CFA² (…) induit un coût élevé en primes de match ».

Questions: 1- Une prime destinée aux joueurs ? Vraisemblablement et 2- Où sont enregistrées comptablement ces primes ? En rémunération du personnel  (voir ci-dessus) pour noyer le poisson ?

Le Rugby Olympique de Grasse a 68 joueurs « Loisirs » et 460 « compétition » soit environ 530 joueurs. Il y a 2 emplois à temps plein.

Dans un compte « prévisionnel » 2016/2017, qui semble mélanger prévision et réalisation, on relève:

Subventions de Grasse: 250.000 €, de la CAPG : 80.000 €, plus 65.500 € (Etat,région,département).

Ce compte présente un budget de quelque 995.000 €, dont les 40 % de subventions ci-dessus.

Question : est-ce une prévision ou une réalisation ? Ce n'est pas clair du tout (c'est mélangé et ne le devrait ).

On note aussi en recettes : « indemnités perçues mutation joueurs » pour 12.000 €.

Question : y a-t-il trafic de joueurs ?

Charges de personnel : « salaires bruts des joueurs »: 176.741 €

Question : un salaire brut de joueur n'est-il pas une rémunération de joueur professionnel ?

 

Donc, approfondir la connaissance de l'utilisation des subventions devient un impératif salutaire.

 

2 - LA PRISE EN CONSIDERATION DE LA LOI

Même si un maire a tendance à oublier qu'il doit respecter « la loi », que ça lui plaise ou non les citoyens et contribuables sont en droit de demander des comptes et à être informés, et les conseillers municipaux, encore plus.

Pour approfondir les relations entre la collectivité et les associations, Internet permet d'accéder aisément à des sites sérieux comme ceux du gouvernement (Légifrance) ou de certains juristes qui décortiquent la loi et la jurisprudence, par exemple :

http://www.seban-associes.avocat.fr/wp-content/uploads/2017/06/Les_relations_entre_collectivites_locales_et_associations.pdf

3 - Le RESPECT de la LOI :

3-1 - L'activité de l'association susceptible d'être subventionnée

Les communes peuvent verser des subventions à des associations qui remplissent des missions d'intérêt général et doivent, en conséquence, respecter quelques règles.

3-2 -Définition légale de la subvention : 

Loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire :

« Constituent des subventions, au sens de la présente loi, les contributions facultatives de toute nature, valorisées dans l’acte d’attribution, décidées par les autorités administratives (mairie, CAPG, département, région, Etat) et les organismes chargés de la gestion d’un service public industriel et commercial, justifiées par un intérêt général (pour le sport, voir ci-dessous) et destinées à la réalisation d’une action ou d’un projet d’investissement, à la contribution au développement d’activités ou au financement global de l’activité de droit privé bénéficiaire. Ces actions, projets ou activités sont initiés, définis et mis en œuvre par les organismes de droit privé bénéficiaires. Ces contributions ne peuvent constituer la rémunération de prestations individualisées répondant aux besoins des autorités ou organismes qui les accordent».

En ce qui concerne les associations sportives, le code du sport apporte des précisions.

Article R113-2 du code du sport (code qui réglemente AUSSI le sport professionnel) :

Les missions d'intérêt général mentionnées à l'article L. 113-2 concernent :

1° La formation, le perfectionnement et l'insertion scolaire ou professionnelle des jeunes sportifs accueillis dans les centres de formation agréés dans les conditions prévues à l'article L. 211-4 ;

2° La participation de l'association ou de la société à des actions d'éducation, d'intégration ou de cohésion sociale ;

3° La mise en oeuvre d'actions visant à l'amélioration de la sécurité du public et à la prévention de la violence dans les enceintes sportives. Toutefois, les subventions des collectivités mentionnées à l'article R. 113-1 ne peuvent être employées pour financer les dépenses résultant de la mise en oeuvre de l'article L. 332-1, ni les rémunérations versées à des entreprises soumises à la loi n° 83-629 du 12 juillet 1983 réglementant les activités privées de surveillance, de gardiennage et de transports de fonds.

 

Apparemment, les clubs grassois ne sont pas des clubs professionnels et les joueurs ne sauraient en aucun cas être rémunérés. Ces clubs ne peuvent percevoir des subventions publiques que s'ils remplissent les missions d'intérêt général énoncées au § 2° ci-dessus .

3-3 - Le contrôle par la collectivité

Une association qui demande des subventions publiques et qui en bénéficie est soumise à la production de documents. Deux montants à retenir: 23.000 € (budget, comptes et compte-rendu financier) et 153.000 € (en plus : bilan de l'exercice, compte de résultat et annexe explicative).

C'est à l'association de demander et à la collectivité de décider sans être obligée de subventionner.

La loi et la convention passée entre l' association et la commune stipulent bien que d'une part un conseiller municipal peut s'intéresser aux affaires de la commune, donc demander des précisions à l'administration  et le maire qui attribue la subvention peut demander tout éclaircissement à l'association sur ses comptes, donc se faire communiquer le grand livre des comptes (détail des enregistrements de la comptabilité).

4 - LA TRANSPARENCE

Quiconque peut demander communication de documents détenus par les administrations . Si le demandeur ne les obtient pas, il commence par s'adresser à la CADA (commission d'accès aux documents administratifs) qui émet un avis et, si l'administration ne s'exécute pas, le demandeur doit demander au T.A. (tribunal administratif) de se prononcer.

Mais l'administration ne saurait fournir les documents qui ne sont pas en sa possession.

5 - LE PROBLEME GRASSOIS

Rappelé par Stéphane CASSARINI en séance du conseil du 11.12.2018 lors de sa question « orale », il y a des soupçons de professionnalisme dans certains clubs de sport de Grasse (ROG et Racing), donc non-respect du code du sport et donc dévoiement de l'argent public.

Alerté d'abord par mes soins, plusieurs fois, puis officiellement par S. Cassarini en séance du conseil, le maire a eu le culot de maintenir sa position : le service instructeur de la ville ne demande pas le détail des comptes aux associations. Pourtant, il le pourrait. Et après l'alerte d'un contribuable et d'un conseiller municipal, il l'aurait dû et il le devrait. J'espère qu'il le fera.

En effet, un moyen simple et efficace de « savoir » consisterait à consulter le grand livre des comptes de l'association, obligatoirement contrôlé par l'expert-comptable pour ces clubs à plus de 153.000 € (cas du Racing et du ROG, notamment). Mais le maire refuse d'agir. C'est là que le bât blesse en ce moment et depuis des années. Espérons que cette attitude inadmissible sera un jour sanctionnée.

6 -  CONCLUSION

En attribuant illégalement des subventions utilisées à payer des joueurs (et non des encadrants) la ville de Grasse est en faute, les clubs bénéficiaires aussi. Le conseil municipal, qui sait MAINTENANT qu'il y a un problème, voterait des subventions sans en connaître l'utilisation et serait aussi en faute.

Il n'y a pas que les associations sportives de concernées. Toutes les associations bénéficiaires de subventions publiques sont tenues de justifier l'utilisation de subventions à la demande du conseil municipal.

Lors du vote des subventions aux associations, les oppositions feraient bien de voter contre, en demandant une analyse plus précise des demandes « suspectes » et ainsi le report du vote à une séance ultérieure. Après mise en conformité du fonctionnement des associations qui auraient « dérapé », les associations vertueuses et qui bénéficient de subventions justifiées par un intérêt général pourraient espérer une aide plus importante et plus efficace pour la société.

Pour information : le scandale des associations (clientélisme) touche encore plus le département. Il suffit d'aller sur le site du département pour être effaré des sommes parfois  attribuées à de drôles de bénéficiaires. La CAPG (président, M. VIAUD), aussi, est touchée par ce phénomène. Et notre conseiller départemental (M. VIAUD) ne veut certainement pas savoir qu'il pourrait demander à être éclairé sur des comptes de « drôles » associations départementales.